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 La critique littéraire > Articles : fr > Claude Louis-Combet

Claude Louis-Combet
L'écriture au-dedans
(Prétexte 4, réed. HS 8)


Notes pour une présentation

haque mot, chaque souffle qu'offre un texte de Claude Louis-Combet contredit toute notion de rupture brutale, d'évolution ou de renouvellement ostensibles. Non que l'oeuvre qu'il s'agit de présenter ne soit pas inventive, au contraire. Mais comme le détachement qui la caractérise la situe en-deçà des courants littéraires identifiables et de l'humeur des journaux, elle paraît se situer à rebours de son époque, s'abîmant avec splendeur et discrétion, avec une violence inouïe parfois, dans la contemplation et dans le ressassement de sa propre genèse. Sorte de volume aux contours incertains qu'aucune perturbation extérieure ne semble altérer, elle occupe une place singulière dans la littérature contemporaine ó et, peut-être, n'ayant comme intercesseur officiel pour elle que la passion obstinée de ceux qui l'éditent et qui la lisent, une place privilégiée. Elle apparaît pour ces raisons tout à la fois infiniment proche et infiniment étrangère, infiniment palpable et infiniment fictive. Et elle est, indéniablement, une oeuvre qui déroute. Mais l'obsession de l'écriture chez Claude Louis-Combet épuise l'incompréhension à laquelle cette oeuvre pourrait se heurter. Elle est simplement, radicalement, le signe d'une rigueur exemplaire qui a su, avec une égale profondeur de voix, unir poésie, essais et fictions1 dans un seul et même mouvement.
 
 

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 Faut-il aborder une oeuvre par ses thèmes ? Il y a ici comme un passage obligé de l'analyse, or Claude Louis-Combet reproche à la critique, dans sa «précipitation intellectuelle»2, de l'avoir affilié, en vertu d'une propension commune à traiter de la trangression, du péché et du sacrifice, à des auteurs tels que Klossowski ou Bataille. Ce qui, selon lui, est une erreur d'appréciation. Effectivement, si l'on compare l'écriture des trois écrivains, on constate d'emblée que la sienne, «lyrique, rythmique, charnelle et amante»,  n'a rien à voir ni avec celle «dépouillée, brutale, et résolument obsène» de l'auteur des Larmes d'Eros, ni avec «les subtilités du maniérisme théologique»3 de l'auteur de Roberte ce soir. Il serait certainement plus fructueux d'aller chercher des parentés dans les articles que Louis-Combet a consacrés aux auteurs qu'il admire, comme Pascal, Kierkegaard, Beckett, Leiris ou Noël. Ces réserves faites, on est bien forcé de reconnaître qu'il existe des invariants, des sujets particuliers à son oeuvre, lesquels créent un univers à part. Sujets, on l'aura pressenti, souvent difficiles : «J'ai écrit, concède l'auteur, de l'éros, du blasphème, de la profanation, de l'hérésie, de la passion incestueuse, des ruses de la grâce et du péché, de la béatitude dans la déchéance et la souillure»4. La seule lecture de ces propos risquerait de classer Claude Louis-Combet parmi les artistes qui flattent un certain goût pour la subversion tapageuse. Mais y déceler un immoralisme foncier serait un contre-sens. La transgression n'est pas chez lui le véhicule d'une idéologie ou d'un système, mais bien le seul moyen d'appréhender viscéralement, poétiquement, ce qui se joue dans le rapport entre existence et péché. La transgression est une manière oblique de signifier le vide, ou l'absence, qui mine l'écriture tout en la rendant vitale : «Il y a, pour ce que je sais de l'écriture, un buissonnement d'affinités qui associent l'enfance au péché et le péché à l'impossibilité de l'expression en même temps qu'à sa nécessité. J'entends bien par péché tout autre chose que la faute circonscrite dans le temps et l'espace de l'histoire individuelle : le péché des origines, celui qui a précédé, de toujours, l'existant que je suis, et qui m'assure un fondement ó dont il m'interdit cependant toute approche frontale»5.
 


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 L'écriture chez Claude Louis-Combet naît en effet d'un constat d'échec : la trajectoire qu'elle dessine est, d'emblée, une trajectoire avortée. De même qu'il est impossible de revenir sur les traces de l'enfance pour comprendre cette rupture d'origine avec la parole, il est impossible de remédier à l'ambiguïté de toute expression humaine. L'écriture oscille entre désir et cruauté, mais elle ne résout rien. C'est pourquoi il faut renoncer à la plénitude du sens, et tout autant à celle de l'être qui l'actualise : dans son processus, elle s'oppose à une harmonie. L'écriture ne saurait donc avoir de vertu thérapeutique (la psychanalyse est jugée «incurablement prosaïque») ni préventive, tout au plus comblera-t-elle un sentiment de vacuité. Ce constat, qui fait écho au «Il faut continuer, je ne peux pas continuer, je vais continuer» de Beckett ou à la réflexion menée par Blanchot dans L'espace littéraire («Le point central de l'oeuvre est l'oeuvre comme origine, celui que l'on ne peut atteindre, le seul pourtant qu'il vaille la peine d'atteindre»6), l'auteur le ressasse dans la plupart de ses essais aux titres évocateurs : L'enfance du verbe, Du sens de l'absence, Ecrire de langue morte, ou encore «Le nécessaire échec»7. Aussi ces difficultés n'exemptent-elles pas de l'effort créatif. Car ó et c'est un paradoxe avec lequel il faut faire route ó on ne peut se soustraire aux nécessités de la langue, à son utilité, sous peine de se murer dans le silence : l'écriture non pas thérapie, toujours rupture, se faisant malgré tout. Et elle devra se constituer humblement, à partir de l'accident qui a jeté autrefois le scripteur «hors du sens et de la vérité» ; si l'échec préexiste à l'écriture, il lui survivra ; l'échec clôt l'écriture et l'entoure, c'est pourquoi il la motive et l'inspire.
 


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 On pourra s'étonner que Claude Louis-Combet répudie l'autobiographie ó du moins l'utilisation qu'il peut en faire (il sait l'apprécier chez Kierkegaard ou Leiris) :  «Surabondance et confusion, lorsqu'il s'est agi d'écrire la première phrase de mon Journal, m'ont voué à la plus silencieuse impuissance» confie-t-il dans L'enfance du verbe8. En fait, sa position participe d'un souci aussi bien esthétique qu'éthique, et concerne l'expression dans son ensemble. Selon lui, la loi du genre autobiographique impose une trop grande soumission du texte à l'ordre du quotidien, de l'anecdote, de la chronique intime, de la justification ; de plus, sous des allures de sincérité, l'autobiographie ne fait que repousser par les moyens qui lui sont dictés le moment d'une illusoire confession. Le rêve d'un espace où le sujet pourrait revivre les moments de son engendrement, puis de sa constitution, l'autobiographie ne peut en conséquence le concrétiser de manière effective, et ce, en dépit de la promesse qu'elle affiche ó promesse d'une meilleure appréhension de soi, d'une plénitude. Il est impossible de saisir le moi à l'instant où il s'écrit. L'origine s'est perdue avec la formulation d'un mot qui manque à jamais, prononcé à «l'absolu commencement»9. Un mot qui échappe à l'entendement et qui marque la rupture irréversible de l'être avec la parole, avec son moi premier : «/.../ le péché qui fit (et défit) l'enfance dispose de tous les mots sauf d'un seul pour tenter de se dire»10. Le «je» de l'autobiographe apparaît comme étant en quelque sorte le mot qui manque à toute phrase et qui demeure en état de formulation lacunaire. Le recouvrement de l'origine étant impossible, l'écriture peut tenter de le mimer dans son procès même : celle-ci doit épouser le mouvement d'un continuum temporel qui aspire à lui chaque phase de l'expérience, passée, présente et future. Il s'agirait ainsi, par un mouvement qui aille du Même au Même, de ramener tout ce qui constitue l'avant, le pendant, l'après de l'être à l'unité du dire. L'écriture ne recherche pas l'exhaustivité, ni la transparence ni la sincérité, mais la marque première de son avènement en se répétant, en se piétinant, en se faisant l'écho de son propre écho. Ce mouvement circulaire convie dès lors le narrateur à se replier sur soi, à s'accorder ainsi «avec ses sources les plus sûres», «avec les forces absolues qui se partagent et qui gouvernent sa destinée» ó avec, en d'autres termes, l'éternité des mythes.
 


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 Le renoncement à l'autobiographie, on le voit, n'implique nullement un renoncement à soi. Une dénégation résolue, pour ne pas dire inflexible, n'exempte personne des paradoxes inhérants à la création. Ne serait-ce qu'au niveau des intentions, Claude Louis-Combet a en commun avec l'autobiographe un comportement mythique qui vise au recouvrement de l'origine. La première personne, de surcroît, n'est pas bannie de son oeuvre. Ainsi pourra-t-elle être employée dans le cadre de la mythobiographie, un procédé inauguré en 1979 avec Marinus et Marina, prolongé avec Mère des croyants et L'Age de Rose. La mythobiographie restitute un mythe où, à la différence de la biographie et de l'hagiographie, le narrateur intervient directement, faisant fusionner sa voix avec celle de l'être qu'il exhume : «L'autobiographie doit se développer sur le territoire des mythes, des rêves, des fantasmes. Elle réalise, en ce sens, un projet anthropologique. Le narrateur cesse de raconter sa vie. Il s'efforce seulement de la déchiffrer dans les miroirs des songes collectifs ou individuels. C'est ce que j'ai appelé une mythobiographie.»11 Et ce procédé peut, dans le corps de la fiction, produire ce type d'intervention : «Dès lors, traduisant /.../ la biographie de la Bienheureuse Marina, dite également Bienheureux Marinus, je ne me séparais pas de ma propre biographie, je ne sortais pas de moi-même, je n'en finissais pas d'identifier mes traces et de m'assurer de mon propre royaume.»12 La mythobiographie n'apparaît donc pas si différente de l'autobiographie, à ceci près que le «je» y exhibe plus nettement le jeu de masques dont il est nécessairement tributaire. Aucune confession ne s'effectue sans que la vérité soit altérée. Et Louis-Combet ajoute : «Si je condamne la prétention à vouloir écrire de soi sur soi en raison de son insincérité, c'est probablement parce que ma propre insincérité est à la recherche d'un moyen qui la protège davantage.»13 Sous ce rapport, le «je» mythobiographique, qui échappe à une détermination et à une individuation fermes, rend l'auteur plus libre face à l'agencement de son propre dévoilement.
 La mythobiographie, quoiqu'elle réponde à une réflexion théorique que plusieurs récits viennent légitimer, ne constitue en rien un système qui ferait prévaloir l'attention à la forme contre un rapport intuitif, voire charnel, avec le texte. Ce qui motive essentiellement Louis-Combet, c'est, comme il le dit lui-même, le déchiffrement de sa vie «dans les miroirs des songes collectifs ou individuels». Aussi concède-t-il que «la différence entre vie imaginaire et mythobiographie est assez ténue dans (son) esprit», et qu'«elle est plus claire en théorie que dans la réalité des textes.»14 Nombre de ses textes consument cette distinction en s'inscrivant dans le registre plus courant de la biographie ó des textes qui, en immergeant la conscience de l'auteur dans celle de son sujet, prennent valeur d'introspection.
 


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 Les biographies qu'écrit Louis-Combet s'opposent ainsi à la biographie telle qu'on l'entend selon une acception courante. La biographie classique est assimilable à une démarche d'historien puisqu'elle fonde son objectivité et sa vraisemblance sur la possible vérification de ses sources, les termes à partir desquels s'établit le contrat de lecture étant en ce cas fidélité, exactitude, ressemblance. Chez Claude Louis-Combet, ce qui préside à la plongée dans un passé incertain n'est pas le désir de reconstitution chronologique, mais l'emprunt d'anecdotes «qui ont valeurs de symboles» et qui ainsi «le délie[nt] de son adhésion au temps et de son engagement dans l'existence d'autrui.»15 Lire Louis-Combet, c'est évaluer l'expérience de personnages qui cristallisent le questionnement du narrateur, un questionnement qui traverse, tantôt implicitement, tantôt explicitement, l'oeuvre entière. «De quelle obscurité rigoureusement propre à l'homme que je suis, la jeune Rosa Florès, future sainte Rose de Lima, est-elle la métaphore ?», s'interroge-t-il à cet égard dans L'Age de Rose.
 La projection du mythe sur une aventure singulière efface en elle tout ce la réduit à n'être que contingence, épisode voué à l'oubli ; elle n'est pas le fruit d'un travail d'exégète, elle est l'élément flottant qui, de loin en loin, éternise des situations. On peut observer dans l'oeuvre de Louis-Combet deux manières d'intégrer le mythe : soit il fournit les données principale dont il convient de respecter les bases (Mélusine, Baubô, Augias, Iphis, etc.) ; soit il agit, avec plus ou moins de clarté, en contrepoint d'un épisode historique pour lui conférer une dimension symbolique (Blesse, ronce noire). L'expérience intime, sous-tendue et soutenue par une conscience mythique, envahit ainsi l'espace du texte et bannit les repères. Chronologie et réalisme sont répudiés au profit d'une évaluation des sources et des virtualités. L'information extérieure n'est utilisée que comme un point de départ dont on s'éloigne très vite. La mythobiographie, la vie imaginaire ó qu'on peut regrouper sous le terme générique de biographie mythique ou symbolique ó, réunissent, pour reprendre les termes de Daniel Madalénat, «des significations préformées dont la permanence prouve l'efficacité et la richesse»16. Ainsi acquièrent-elles une puissance d'évocation qui, pour éloignée qu'elle soit des choses extérieures, prend un sens plein pour notre condition.
 


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 «Et il me plaît d'appartenir à une culture pour laquelle le mot qui désigne l'âme est un mot féminin, inducteur de réceptivité, de passivité, de flexibilité : capacité à s'empir en se déversant, ardente vacuité à laquelle tendent les désirs en mouvement ó et lorsque ceux-ci demeurent en suspens, renoncés, irrésolus : abîme de l'Absence.»17 La large part que confère l'oeuvre aux femmes ó qu'elles soient mères, soeurs, filles ou amantes, pécheresses, sensuelles ou saintes ó n'est pas indifférente. En effet, selon Louis-Combet, l'écriture est une émanation directe de la femme : «J'ai toujours pensé que l'écriture, en tant même que passive activité, avait un rapport fondamental avec cette ombre de féminité en moi qui est la gardienne de tous les mots.»18 La femme peut tout à la fois incarner les fantasmes violents de castration, d'inceste, mais ceux plus réconfortants d'immobilité, de protection, et, idéal absolu, de communion.
 Soumettant le texte au désir et à l'horreur de façon simultanée, elle lui fournit également les conditions de son accomplissement. Dans Blesse, ronce noire, Gretl Trakl est la source d'inspiration de l'écriture de son frère Georg : «L'élaboration de tout poème s'accomplissait dans le cours d'un véritable dialogue intérieur où il s'entretenait avec elle, la proche-lointaine, l'amante, du sens à quêter, du hasard de l'aventure, de l'inflexion du nombre, de la nécessité de l'image : où il l'interrogeait sur le rythme, le symbole, la croissance interne du texte comme si ce fût elle-même qui eût à lui donner forme.»19 Suzanne, épouse de l'architecte dans la nouvelle «Érophonium» (Rapt et Ravissement), est quant à elle le modèle organique d'une maison à édifier : «Il importait de toute nécessité que la femme fût là, au coeur et au fondement, car le plan ne pouvait s'élaborer que dans la contemplation de sa forme et dans l'éternisation de l'amour.»20 On pourrait évoquer bien d'autres situations où le mâle «cède le pas à la femme qu'il porte en lui ó à celle qui le porte en elle-même»21, et parvient, de fait, à se faire créateur.

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 Pour conjurer l'horreur et l'abjection, ce sera donc la sensualité ó don, s'il en fut, éminemment féminin ó que la phrase s'emploiera résolument à célébrer. La prose poétique de Louis-Combet confine à la prière, et, plus précisément, à la prière des femmes, puisqu'en lui «ne [s'est] jamais démentie l'intuition que la prière (adoration, supplication) [est] un accomplissement de la féminité /.../.»22 La phrase, produit du souffle et de la chair, devient l'exercice soutenu d'une intériorité qui aspire à la plénitude ; elle «se déroule également, en soi, /.../, comme une opération magique»23. L'ouverture du chapitre central de Blesse, ronce noire  en fournit un des exemples les plus remarquables : «Le visage d'angle n'a pas hésité longtemps au-dessus des eaux noires. Il a trouvé son point d'attaque. Il va enfoncer son coin. Quelle image, dans quel autrefois, a représenté la façon incisive dont un astre dévore un astre avant de se confondre avec lui en la même ombre : scène d'éclipse - angoissante, mystérieuse, adorable ? L'odeur des résineux engorge la ronde clairière jonchée de troncs abattus et de piles de bois, entre lesquels se haussent des bouquets de digitales et de jacinthes sauvages et prolifère l'essaim de toutes les fleurs de prairie. Des insectes bourdonnent continûment. Le monde des hommes est aboli dans les lointains et l'heure est seule.»24 Les mots étant avant tout l'émanation d'une intériorité, ils nous rappellent ici leur vertu incantatoire. Louis-Combet, qui n'hésite pas à rejeter l'intellectualisation et les formes «nées de l'esprit (qui) s'adressent à l'esprit»25, tente de préserver dans l'acte d'écriture un ordre naturel qui laisse le texte naître et vivre de façon naturelle. Le liturgique supplante le discursif. Moins soucieuse d'inculquer un savoir que de transmettre une musicalité, la phrase tente de retrouver l'élan éruptif du Verbe. Et, ayant pour vocation d'imprimer à la mémoire son propre battement, elle suspend la narration à un mouvement circulaire, répétitif, opposé au temps linéaire de l'Histoire. Elle l'exhorte à s'enfoncer en elle-même.
 


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 Chaque fiction de Louis-Combet, en conséquence, ressemble étrangement au corps du petit Urs («Ouroboros junior», in Rapt et Ravissement) dont la difformité rend possible la «conjonction de la bouche et de l'appendice phallique». Difformité qui n'a d'autre fonction de métaphoriser un temps clos sur lui-même. Il y a bien une logique du récit qui s'indexe au départ sur une logique temporelle ó on nous livre les conditions préalables à la bisexualité de Marina, à l'union de Gretl et Georg, à la passion délirante de Rose, etc. , or cette logique prend un autre tour à mesure que l'on tourne les pages. Bientôt les rappels, les piétinement, le ressassement, ralentissent le rythme. Les événements s'organisent autour de l'anéantissement des protagonistes ó par la perte de la parole, par la perte de l'identité, par l'auto-destruction, par la folie.
 Chaque fiction, en conséquence, semble aspirer «au recouvrement périodique de l'illud tempus des commencements» (Eliade) propre à la pensée mythique, illustrant ainsi le geste rituel, constamment rejoué, imposé par une croyance en une Origine.
 L'immobilité de la naissance n'a d'égale que l'immobilité de la mort, l'attitude foetale ne cessant d''être recherchée dans des simulacres d'anéantissement.
 Et seule la phrase, au bout du compte, parvient à s'expandre avec bonheur là où tout le reste s'amenuise.

Jean-Christophe Millois

Notes
1 Une trentaine de publications à laquelle il faut ajouter les activités de traducteur (Anaïs Nin, Otto Rank, Erik Erikson) et de directeur de collection chez Jérôme Millon (Atopia).
2 «Entretien avec Claude Louis-Combet», in Revue Prétexte n°4, mai-juin 1995, p. 22.
3 Ibid.
4 Ibid
5 Le Péché d'écriture, José Corti, 1990, p. 92
6 Maurice Blanchot, L'Espace Littéraire, Folio Essais, p. 60
7 Respectivement parus chez Flammarion (1976), Lettres Vives (1985), Ubacs (1986), Deyrolle (in Miroirs du texte, 1995).
8 L'Enfance du verbe, Flammarion, 1976, p. 145
9 Le Péché d'écriture, op. cit., p. 1OO
10 Ibid (propos extrait de la quatrième de couverture)
11 Entretien avec A. Poirson, cité dans Le matricule des anges n°11, p. 16
12 Marinus et Marina, Flammarion, 1979, p. 220
13 Écrire de langue morte, Ubacs, 1986, p. 39-40
14 V. Prétexte, op. cit., p. 25
15 Le pêché d'écriture, op. cit., p.43
16 Daniel Madalénat, La biographie, PUF, p. 194
17 L'Âge de Rose, José Corti, p. 223
18 Le Péché d'écriture, op. cit., p. 116
19 Blesse, ronce noire, José Corti, p. 95
20 Rapt et Ravissement, Deyrolle Éditeur, 1996, p. 62
21 Le Péche d'écriture, op. cit., p. 116
22 L'Âge de Rose, op. cit., p. 222
23 Le Péche d'écriture, op. cit., p. 47
24 Blesse, ronce noire, op. cit., p. 63
25 Ibid.

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