Collectif Écritures contemporaines 2, textes réunis par Jan Baetens et Dominique Viart | Etats du roman contemporain Lettres Modernes , 1999 (Prétexte 21/22) |
ruit d'un colloque qui s'est tenu à Calaceite en 1996, cette deuxième livraison de la série que dirige Dominique Viart aux Lettres Modernes constitue une approche remarquable des récents renouvellements narratifs. Les études, à la fois profondes, sensibles et éclectiques, ont été ici réunies avec l'intention manifeste de fournir une vision cohérente d'une période pour laquelle les repères ó mouvements idéologiques, littéraires, etc. ó font défaut. La gageure était donc de trouver des présupposés communs aux auteurs, et de les regrouper en fonction. Ainsi ce livre s'organise-t-il en quatre parties distinctes : «Une constellation de Minuit» (pour «proposer un aperçu des nouvelles formes d'écriture qui ont trouvé là leur espace éditorial», comme celles d'Echenoz, Savitzkaya et Volodine) ; «Variations sur le romanesque» («une interrogation sur le genre et ses possibilités» que formulent Quignard, Pirotte, Germain, NDiaye, Lépront ou Sallenave) ; «Présences du sujet» (réponses de Michon, Rouaud, Bon, à la déconstruction de ce sujet opérée par la modernité) ; «Ellipses du sujet» (propres aux écrivains préférant «jouer des possibilités combinatoires de l'écriture»). Chacun de ces ensembles est ponctué par les essais de synthèse de Jan Baetens («Crise des romans ou crise du roman ?»), de Dominique Viart («Filiations littéraires») et de Semir Badir («Histoire littéraire et postmodernité»), lesquels, en prenant à rebours le discours ambiant qui accompagne la production romanesque, démontrent à quel point les nouvelles orientations esthétiques «éclairent notre temps», et méritent à cet égard d'être interrogées. Pour quelles raisons parle-t-on de crise, et comment analyser, comment valoriser des oeuvres marquées par «l'inféodation du littéraire au culturel et à l'idéologique» (J. Baetens) ? Où l'écriture aujourd'hui trouve-t-elle son identité, et de quelle manière investit-elle son passé pour s'inventer (D. Viart) ? Problématiques ambitieuses évidemment impossibles à épuiser en une quinzaine d'articles, mais qui donnent la mesure du projet. Aussi ce livre est à tous les niveaux exemplaire de ce que la critique littéraire - «cette écriture au service des écritures», nous dit Jean-Pierre Richard - inspirée, passionnée, peut accomplir ; on souhaite très vivement qu'elle fasse école.
Jean-Christophe Millois
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