Descriptif
:
"
ce qui ne peut se prononcer de bouche vivante // la mesure
à accomplir en deçà du disant "
Composé de deux livres, (le premier, Savoir d'écartement,
étant d'une écriture plus ancienne que le second, Nu de tête-être)
l'ensemble formé par ces deux parties a cependant sa cohérence.
Cohérence d'écriture et de ton, cohérence de composition aussi
(puisque ces deux livres, n'en formant ici qu'un seul, sont
à considérer comme ayant leur propre structure interne, sans
être seulement des " recueils " regroupant des poèmes disparates,
et qu'en outre, ainsi placés l'un à la suite de l'autre, ils
dénotent une progression dans l'écriture de l'auteur), cohérence
thématique enfin, puisque la poésie de Rodrigue Marques de
Souza est tout entière tendue vers la double interrogation
du corps et du sens comme intimement soudée à la voix et au
poème. Une charnellité très présente donc, au fil de poèmes
qui, avec violence parfois, avec une rage mordante, scrutent
le corps dans ses variations et ses errances, ses blessures
et ses inconnus, ses vertiges et ses plaisirs fatigués, ses
bassesses, ses essoufflements et ses respirations. Un corps
qu'il faut ici tenter de circonscrire, à la fois dans sa réalité
crue de composé organique (cette " distance admise pour le
pur ") et dans ce " moment blanc de langue " qu'il représente.
Comment dire cette dualité, cette " tonitruante cognée / racle
d'âme ", avec tout ce que cela comporte de difficultés d'évocation,
de figures à décanter, de quête d'images s'incrustant dans
le mouvement de la pensée ou de parts d'abstraction qui viennent
s'inscrire, tel un sur-langage, seul capable parfois d'atteindre
son objet, voilà le nœud d'écriture qui travaille la poésie
de Rodrigue Marques de Souza.
Dans une proximité avec certaines poétiques (on pourra songer
à des échos de poètes tels que, par exemple, Bernard Noël,
Jean-Louis Giovannoni ou Patrick Wateau), Rodrigue Marques
de Souza fait montre d'une profonde recherche d'une voix poétique
propre, alliant abstraction et charnellité, vers scandé et
vers plus souple, ruptures et rejets, quête de vocables inusités
là où " le verbe accompagne les restes ".
L ’auteur :
Rodrigue
Marques de Souza est né en 1970. Il vit actuellement à Paris
où il travaille. Il a publié de la poésie en revue, et fait
paraître un premier livre, Nombre, aux éditions Dana en 2003.
Extraits
:
le
moment de prendre bras
l'avoir
d'écourter la terre interne
fraction
le moment de louange rance
de poursuivre éviscéré
et là laissé
le moment de savoir retour
d'avoir l'écartement
la sortie de la raison morne
que ceindre peut
que la question fonde le théorème lent
-/-
volume de herses
qui est sans peine sans
comment manière de chair
les retenues de butte chaque faute
l'émission de chaque faute
la butte de rendre corps
au fils mort le onze août le crâne cassé
-/-
au veilleur sommeil de crâne
quel repos nourrissent herses
à combe annulation d'air comme
tempes de temps par l'aiguille internée
dans la lutte longe la jette
hordes :
la lettre-langue l'appareil sec
-/-
creux de main à ne pas emplir
l'intérieur pesé du geste
itération écart
de réduire
d'entreprendre enfoncement
dans ce n'est pas
ce qui ne peut se prononcer de bouche vivante
la mesure à accomplir en deçà du disant
mais pour plusieurs bouches une lettre un éclat